Actualités

< Retour

Les enjeux de la gouvernance varient selon la maturité de l’entreprise

Plus que jamais aujourd’hui, les sociétés se reposent sur leur capital humain longtemps mis de côté au profit du capital financier. Pierre-Olivier Bernard, fondateur du cabinet Opleo Avocats, apporte son éclairage sur les sujets de gouvernance primordiaux dans la vie d’une entreprise et de son dirigeant et les moyens d’éviter les pièges qui en découlent.

Décideurs. Vous êtes spécialisés dans le traitement des enjeux de gouvernance, quels sont-ils aujourd’hui ? 

Pierre-Olivier Bernard. Alors qu’auparavant elles se concentraient avant tout sur leurs actifs financiers, les entreprises d’avenir évoluent et se reposent de plus en plus sur le capital humain. Dans cet environnement, les enjeux de gouvernance sont primordiaux, car celle-ci est au service du projet d’entreprise, de son modèle économique et donc de sa valorisation. Lorsqu’une même personne porte différentes casquettes au sein d’une société – actionnaire, associé, manager ou productif – la question de l’organisation de la gouvernance se pose. Cela passe aussi bien par sa transmission, sa volatilité et surtout sa pérennité, car il ne s’agit pas d’un actif matériel, mais bien de capital humain.

Les pouvoirs publics ont tendance, notamment lorsqu’ils parlent de transmission d’entreprise, à traiter le sujet uniquement à travers le spectre des entreprises familiales. En réalité, tous les dispositifs fiscaux, au lieu de considérer l’actif « entreprise » comme un actif autonome dans le patrimoine d’un individu, n’abordent que l’enjeu patrimonial. Or, une entreprise est une collectivité et la vision purement actionnariale a bien souvent conduit à des politiques court-termistes, certes dans l’intérêt des actionnaires, mais qui n’est pas forcément celui de l’entreprise dans son ensemble. Notre mission est donc de rendre le processus de décision le plus transparent possible dans l’intérêt des dirigeants, mais aussi de l’entreprise.

Quelle a été l’incidence de la crise sanitaire sur votre activité, notamment en matière de management packages ? 

Avant tout, n’oublions pas que cette crise n’est pas une crise des liquidités. Beaucoup nous prédisaient un « mur » de faillites, mais grâce aux différentes aides du gouvernement, celui-ci ne s’est pas matérialisé. Si certaines entreprises resteront au tapis, il s’agit de structures qui connaissaient auparavant des difficultés. La crise n’a fait que mettre en lumière leurs dysfonctionnements. Ainsi, compte tenu des enseignements tirés de la précédente crise financière, les conséquences sur les management packages demeurent marginales.

Par ailleurs, bien que les opérations aient été ralenties ou reportées dans un premier temps, elles ont rapidement repris, tout particulièrement sur les secteurs les plus porteurs. Tant qu’il y a des liquidités, les acquisitions et les LBO se poursuivent. Comme notre pratique n’est pas sectorielle et que nous sommes le maillon de toute une chaîne économique, nous n’avons pas constaté de véritable baisse d’activité.

« Tant qu’il y a des liquidités, les acquisitions et les LBO se poursuivent »

Comment ce sujet de gouvernance est-il traité lors d’une opération de private equity ? 

Les enjeux de gouvernance varient selon la maturité de l’entreprise. Par exemple, nous n’avons pas l’occasion d’accompagner de start-up au stade de leurs tours d’amorçage ou de capital-risque. À ce niveau, ces entreprises sont peu consommatrices de conseil juridique, pourtant elles devraient l’être, car la clef du succès passe par l’anticipation.

En revanche, nos clients commencent à faire appel à nous à l’étape du capital-développement. Lorsqu’un fonds identifie une belle cible, le management n’a pas encore forcément structuré sa gouvernance et risque de se voir imposer un pacte d’actionnaires faute d’avoir anticipé. L’équipe managériale peut alors être remplacée par le fonds et le fondateur dépossédé du pilotage de la stratégie de sa propre entreprise. Une levée de fonds n’est pas une simple opération de haut de bilan. Elle touche au patrimoine professionnel et privé du fondateur, mais il faut aussi s’assurer que celui-ci puisse rester maître du projet qu’il a construit. C’est fondamental et c’est là que nous intervenons.